De 1585 à 1594, la Ligue parisienne publie près d’un millier de libelles au sein desquels les références historiques sont innombrables et très variées. Dédiée aux pratiques discursives et à leurs fonctions politiques et socioculturelles, cette enquête étudie en trois temps les usages du passé dans les textes polémiques produits par les catholiques zélés. Premièrement, se consacrant aux formes et aux fonctions du passé, l’article montre comment, selon des modalités à la fois médiévales et modernes, le passé a constitué un argument et un modèle qui ont permis aux ligueurs d’affermir leur interprétation du présent, d’accuser leurs adversaires et même de prédire l’avenir ou d’appeler à l’action. Dans un deuxième temps sont étudiées les sources employées par les polémistes pour convoquer le passé dans leurs écrits : il s’agit de montrer comment ces auteurs, qui n’ont reçu aucune formation historique, mentionnent leurs références au sein de leurs libelles, puis de chercher à déterminer les sources qu’ils ont véritablement employées sans toutefois les citer. Enfin, l’enquête inscrit davantage ces résultats dans leur contexte en proposant, notamment grâce au concept de violence symbolique, des hypothèses quant aux enjeux sociaux de ces pratiques culturelles, interrogeant leurs conséquences sur les rapports entre les libellistes et leurs lecteurs, ainsi que l’identité de ces derniers.