Invitation 09 juin 2023


Faire de l’histoire avec Daniel Roche

 

 

La Revue d’Histoire Moderne & Contemporaine et l’Institut d’Histoire Moderne et Contemporaine (CNRS/ENS-PSL/Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) s’associent pour rendre hommage à Daniel Roche, sous forme de trois tables rondes successives.

Chaque table ronde donnera lieu, après de brèves interventions liminaires,  à une discussion libre avec l’assistance. 

Les débats seront suivis d’un cocktail amical.

Vendredi 9 juin 2023, de 13h30 à 20h30

Amphithéâtre du Centre Malher

9 rue Malher, 75004 Paris (Métro Saint-Paul)

13h30 > 15h00 : table ronde n° 1 : La France des Lumières

15h15>16h45 : table ronde n° 2 : Paris, les villes et les savoirs

16h45 : pause café

17h15>18h45 : table ronde n° 3 : Les engagements collectifs de Daniel Roche

18h45 : cocktail amical

 

Avec la participation, notamment, de Franco Angiolini, Pascal Bastien, Jacques Bottin, Isabelle Brian, Haïm Burstin, Jean-Luc Chappey, Christophe Charle, Roger Chartier, Natacha Coquery, Sabine Juratic, Muriel Le Roux, Antoine Lilti, Nicolas Lyon-Caen, Vincent Milliot, Philippe Minard, Nicole Pellegrin, Liliane Perez, Michel Porret…

 

Interventions et débats seront filmés et enregistrés.

 

Inscription préalable par simple courriel envoyé à alexis.darbon@ens.psl.eu avant le jeudi 25 mai 2023

 

                                     

     


Daniel Roche nous a quittés (1935-2023)

 

 

Daniel Roche, historien des Lumières et du peuple, directeur de la Revue d’histoire moderne & contemporaine


L’historien Daniel Roche, ancien professeur au Collège de France, est décédé à son domicile, paisiblement, dimanche 19 février 2023, dans sa 88e année. Il aura marqué des générations d’historiennes et d’historiens en France, par l’ampleur de son œuvre et la générosité de son écoute, toujours bienveillante. 

C’était un grand savant, au sens le plus noble du terme, convaincu du pouvoir émancipateur de la culture, mais aussi très sensible à la dureté des inégalités sociales. Un homme de science et de cœur à la fois, toujours attentif aux autres ; et surtout un esprit libre et espiègle, sinon indocile, et d’une extrême probité. 

 

Né à Paris en 1935, Daniel Roche a vu sa famille chahutée par la guerre et ses suites. Après un premier cursus en CAP métallurgie, il fut poussé par ses anciens professeurs à poursuivre des études, qui le conduisirent à la Sorbonne, et il entra à l’École Normale Supérieure de Saint-Cloud en 1956. Magie des Trente Glorieuses, où un apprenti métallurgiste pouvait arriver à l’ENS puis au Collège de France !

Agrégé d’Histoire en 1960, il épouse Fanette Pézard, future spécialiste du futurisme italien, et professeure d’histoire de l’Art. Par son entremise, il nouera une relation particulière avec l’Italie en général, et Venise en particulier, berceau-refuge du jeune couple. La complicité entre eux était généreuse, vive et joyeuse ; la disparition de Fanette en 2009 sera un choc terrible, malgré le soutien indéfectible de leur fils Olivier.

Professeur de lycée à Châlons-en-Champagne de 1960 à 1962, Daniel Roche est ensuite successivement maître-assistant à l’ENS de Saint-Cloud puis à la Sorbonne, chargé de recherche au CNRS et maître de conférences à l’université Paris 7. Devenu professeur, il enseigne à l’université Paris 1, puis à l’Institut Universitaire Européen de Florence (1985-1989), et comme directeur d’études à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (1989-1998). Enfin, il est élu en 1999 titulaire de la chaire « Histoire de la France des Lumières » au Collège de France.

Tout au long de sa carrière, il occupa de nombreuses fonctions et responsabilités dans de multiples institutions de recherche, en France et en Europe (notamment au CNRS, à la tête de la section 33, puis de l’Institut d’Histoire Moderne & Contemporaine), et reçut de nombreux prix et décorations. Aux côtés de Pierre Milza, il présida aux destinées de la Revue d’Histoire Moderne & Contemporaine, à laquelle il est resté très attaché jusqu’au bout.

Sa thèse très remarquée sur les académiciens de province au XVIIIe siècle (soutenue en 1973, et publiée en 1978) contribua à redessiner le champ de l’histoire sociale et intellectuelle des Lumières, dont il devint l’un des plus grands spécialistes. Son livre sur les hommes des Lumières (Les Républicains des Lettres,1998) illustre par maints exemples sa manière particulière de lier ensemble histoire du livre, histoire des sociabilités et histoire des consommations culturelles. Son œuvre se déploya également dans trois autres directions : tout d’abord l’histoire du peuple et de la culture populaire au XVIIIe siècle, avec le savoureux Peuple de Paris (1981) et l’édition commentée du Journal de ma vie rédigé par le compagnon vitrier Ménétra ; il donna aussi une impulsion décisive aux études sur la culture matérielle et la consommation, avec les deux livres-phares que sont La culture des apparences (sur l’histoire du vêtement, 1989) et Histoire des choses banales (1997) ; enfin, ses derniers travaux ont porté sur la culture équestre et les rapports multiples entre l’homme et le cheval, joignant ici la recherche et une passion personnelle pour l’équitation (Histoire de la culture équestre, 3 volumes, 2008-2015).

Toute sa vie, il alterna enquêtes novatrices et synthèses percutantes. Il publia ainsi une somme magistrale sur Les Français et l’Ancien Régime (1984, avec le grand historien Pierre Goubert) ; et sa France des Lumières (1993) reste l’un des plus grands livres jamais écrit sur notre pays au XVIIIe siècle. Il fut aussi un inlassable animateur d’enquêtes collectives qui, toutes, ont fait date : relevons entre autres l’étude de l’accueil des migrants à Paris, fin XVIIe-début XIXe siècle (La ville promise, 2000), le volume de l’Atlas de la Révolution française consacré à Paris (2000), ou encore le grand projet sur Les capitales culturelles (2002 et 2009). Il fit de son séminaire au Collège de France une tribune de libre discussion expérimentale pour tous ses élèves et amis, comme le reflète l’ouvrage offert par ses disciples en 2011 : La grande chevauchée. Faire de l’histoire avec Daniel Roche (Droz). L’édition toute récente de la suite des écrits du compagnon Ménétra aura été sa dernière aventure collective : Les Lumières minuscules d’un vitrier parisien (Georg, 2022).

Sa vie aura été marquée par de fortes fidélités (à son maître Ernest Labrousse, qui initia toute une génération à une histoire à la fois  économique et sociale; à son ami Pierre Goubert, entre autres) et de tout aussi fortes amitiés, avec les anciens camarades de classe (le journaliste Claude Sales, le philosophe Roland Brunet, les comparses rencontrés à la Jeunesse Étudiante Chrétienne aussi), mais surtout avec Jean-Claude Perrot (disparu en 2021), auquel le lia un long et heureux compagnonnage : leur séminaire commun à l’EHESS, a été un lieu de formidable échange intellectuel, toujours inventif, et le creuset de nombreuses vocations. La rencontre, enfin, avec Pierre Bourdieu, fut l’occasion d’un dialogue fructueux entre historien et sociologue, mais aussi de combats communs en défense de la recherche publique et de l’université contre toutes les attaques néo-libérales.

Daniel Roche a été à la fois un pionnier et un passeur, déjouant tous les compartimentages obtus. Sa courtoisie et sa bienveillance, assises sur de solides convictions humanistes, son engagement social, sa culture encyclopédique et sa curiosité insatiable, le sourire jovial qui illuminait son visage, en ont fait un membre éminent et aimé de la République des Lettres. « La fraternité, écrivait-il, est l’horizon auquel on peut aspirer » : Puisse sa leçon être entendue.

 

 Pour le comité de rédaction, Philippe Minard

Co-directeur de la Revue d’Histoire Moderne & Contemporaine.

 

 

Voir le carnet du journal Le Monde, pour la dernière cérémonie : Le Monde daté vendredi 24 février 2023, page 29.

Voir aussi, « À nous la liberté ! Lire et travailler avec Daniel Roche » par Vincent Milliot, En attendant Nadeau

Et une liste (provisoire) des divers hommages récents sur le site de l'IHMC-CNRS.

 

Retrouvez Daniel Roche en images et en audio 

PolitikaL'héritage des Lumières. Entretien avec Daniel Roche

Radio France, Les lundis de l’histoire, Parcours d’un historien (Daniel Roche avec Antoine Lilti et Philippe Minard)


 

 

Des archives de plus en plus secrètes ?


Table ronde de la Société d’Histoire Moderne & Contemporaine

Lundi 7 juin 2021, 13h.30 – 18h. (par visioconférence)

Lien d’inscription préalable au webinaire : https://zoom.us/webinar/register/WN_ZAI33kDeRUaKN7ZAmcvOwg

Pour tout contact : sr.rhmc@gmail.com
www.rhmc.fr

Aller aux archives, faire du terrain, obtenir des dérogations… Toutes ces démarches, qui constituent l’ordinaire du métier d’historien, deviennent depuis un an de moins en moins évidentes. Avant la crise sanitaire, déjà, des règlementations administratives, telle l’IGI 1300, ou des mesures plus politiques, dont témoignent les débats autour de la Commission Duclert, sur les archives françaises relatives au génocide des Tutsi (1990-1994), tendaient déjà à diminuer considérablement l’accès aux archives contemporaines en France, et ailleurs dans le monde.

Cette table ronde sera l’occasion de revenir sur ces sujets d’inquiétudes et de proposer un espace de débat entre conservateurs, juristes et historiens. Il s’agit aussi de mettre le cas français en perspective, en interrogeant les évolutions récentes en matière d’accès aux archives publiques dans d’autres espaces – post-soviétique, sud-américain, moyen-oriental – où des restrictions, voire une privatisation des archives publiques sont observables. Assistons-nous à un mouvement global de restriction de l’accès aux archives ? Et, si oui, quelle en est l’ombre portée sur la pratique des historiens et les approches historiographiques ? De manière plus générale, c’est aussi l’accès des citoyens aux archives et la question des politiques publiques de la mémoire qui sont en débat.

Augustin JOMIER (CERMOM – INALCO) : Introduction

Noé WAGENER (MIL – Université Paris-Est Créteil) : Le droit d’accéder aux archives publiques

Sophie COEURE (ICT – Université Paris Diderot) et Florin TURCANU (université de Bucarest) : Trente ans après. Regard sur les archives des régimes communistes

Nina VALBOUSQUET (École française de Rome) : Les Archives du Vatican et l'ouverture des fonds Pie XII, controverses mémorielles et enjeux historiographiques

Sylvie THENAULT (CHS – CNRS) : Entre histoire, mémoire et politique : la question des archives sur les disparus de la Guerre d'indépendance algérienne

François ROBINET (CHCSC – Université Paris Saclay) et Florent PITON (Université de Paris – CESSMA) : Écrire et l’histoire du génocide des Tutsi rwandais depuis la France et le Rwanda : des archives à parts égales ?

Olivier COMPAGNON (IHEAL CREDA – Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3) : États faillis, requêtes judiciaires, alternances politiques : quel accès aux archives pour les historien.nne.s de l’Amérique latine ?

Françoise BOSMAN (Conservatrice, ancienne directrice des Archives nationales du monde du travail): Les écueils de la mission archivistique en France