De la race aux races dans l’Amérique hispanique républicaine (1770-1900)

Les transformations politiques de la race
Par Clément Thibaud
Français

Lors des révolutions de l’indépendance de l’Amérique espagnole (1810-1825), les nouvelles constitutions libérales et républicaines ont voulu marquer la rupture avec la monarchie et le « système colonial » en récusant la transmission de la dignité (noblesse, offices et charges) et de l’indignité (statuts racialisés) à travers les générations. Elles cherchaient ainsi à détruire juridiquement les fondements généalogiques d’un ancien régime qui avait, en outre-mer, une forte dimension raciale. Les émancipations insistèrent cependant sur la dimension naturelle, supposément raciale, de la citoyenneté. Comment expliquer la contradiction apparente entre élision juridique et recomposition politique de la racialisation ? Le premier temps de l’argumentaire s’attache au polymorphisme des processus de racialisation à la fin de la période coloniale, associés à la « pureté de sang », à la « classe » en tant que catégorie émique ou aux savoirs des Lumières. Le deuxième montre comment la naturalisation des rapports sociaux fut bouleversée par la dynamique révolutionnaire. La conjoncture ouvre de nouveaux espaces pour repenser la racialisation dans un cadre devenu libéral et républicain, comme l’atteste la pensée de Bolívar. La dernière partie cherche à mesure ces transformations postrévolutionnaires des pratiques de racialisation en s’attachant à la mention du statut racialisé (pardo, negro, indio) dans les registres de baptême. Du Mexique à l’Uruguay en passant par la Bolivie, on constate la résistance des catégories coloniales et leurs transformations au xixe siècle.

Mots-clés

  • racialisation
  • classe
  • Amérique espagnole
  • indépendances de l’Amérique hispanique
  • monde atlantique
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