Pionnière et discutée : la réforme agraire au Mexique depuis 1917

Les cent fleurs de la réforme agraire (XXe siècle)
Par Alejandro Tortolero Villaseñor, Eva Touboul Tardieu
Français

Cet article interroge d’abord les principales sources d’inspiration de la réforme agraire mexicaine, inscrite à la fois dans le contexte de la révolution entamée en 1910 et dans la recherche d’un fondement à la nation en construction. Le diagnostic d’A. Molina Enríquez, selon lequel l’hacienda (grande propriété et exploitation extensive de la terre) est la cause du retard agricole du pays, devient le schéma d’interprétation dominant. À l’instar des « régénérateurs » espagnols de la fin du XIXe siècle, Molina met en relief la communauté mais insiste aussi sur le rôle, y compris politique, de la petite propriété du ranchero (le petit paysan) appelé à devenir le principal fondement de la nation métisse mexicaine. C’est ce modèle qu’adoptent les révolutionnaires, en simplifiant outrancièrement la mosaïque agraire mexicaine. Ainsi la constitution de 1917 précise que les terres et les eaux sont le patrimoine de la nation et prévoit leur distribution en dotant les communautés de biens (les ejidos) en principe prélevés sur les haciendas. Il s’agit de biens possédés en communs mais exploités individuellement. En fait, la mise en œuvre de cette réforme agraire a connu des modalités et des rythmes différents, allant du maintien des haciendas (parfois récupérées par les généraux révolutionnaires) à la reconstitution des pueblos (villages) traditionnels avec leurs ejidos. Elle s’est parfois accélérée, comme sous le gouvernement de L. Cardenas, en 1934. Entre 1920 et 1964, elle a distribué 53 millions ha (27 % de la superficie agraire du pays). En définitive, cette transformation, tout en consolidant l’ejido, a assuré la primauté du petit exploitant bien que sous le contrôle de l’État.

Mots-clés

  • Mexique
  • XXe siècle
  • structures agraires
  • hacienda
  • communauté (ejido)
  • nation
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