Le foulard bleu était le symbole d’appartenance aux Jeunes Pionniers, organisation de jeunesse créée en 1948 dans la zone d’occupation soviétique pour encadrer les loisirs des enfants entre six et quatorze ans. À partir de 1949 et de la création de la RDA, les Jeunes Pionniers devinrent le « premier creuset de l’organisation politique collective » de la jeunesse. Sur la base d’une analyse discursive, iconographique et anthropologique, nous entendons retracer l’évolution du sens du port du foulard. Réalité institutionnelle et normative qui s’imposa non sans difficulté à partir de la fin des années 1950, le foulard devint un élément symbolique incontournable des discours et des images officielles. Le porter, c’était pour les dirigeants du SED afficher son engagement voire son amour envers le socialisme. Au début des années 1950, le foulard renvoyait à l’appartenance à une minorité politique en proie à l’hostilité verbale voire physique des autres camarades. Mais à partir de la fin des années 1950 et de la transformation des Jeunes Pionniers en une organisation de masse, le foulard était devenu avant tout l’expression d’une contrainte institutionnelle et marquait le triomphe du formalisme. À travers l’étude du foulard des Pionniers, c’est finalement tout l’échec du projet éducatif et politique prométhéen des communistes que l’on peut lire : à défaut de créer l’homme socialiste nouveau, les autorités politiques et éducatives ont fait émerger un sujet socialiste discipliné et conformiste.