De l'« efficacité » des politiques publiques : la lutte contre l'avortement « criminel » en France, 1890-1950

Politiques de la population
Par Fabrice Cahen
Français

La lutte contre l’avortement clandestin, étudiée dans sa genèse, ses formes institutionnelles, et son rapport aux populations ou catégories cibles, révèle une variété de facettes qui interdit d’y lire un simple phénomène répressif ou même coercitif. L’examen des instruments et méthodes d’action, préconisés ou effectivement institués, permet de considérer l’articulation de moyens conventionnels de « contrôle des corps » et de techniques plus subtiles d’activation de ressorts moraux ou normatifs. Objet d’une politique publique, la population (en tant que regroupement d’individus dont l’assentiment, et plus encore la subjectivation conditionnent la réalisation des fins posées) en est aussi actrice. La réceptrice des messages diffusés par les adversaires de l’avortement est travaillée jusque dans sa sensibilité, son sens moral, son rapport au temps et à l’avenir. Il devient dès lors délicat de s’arrêter au constat d’une « inefficacité » de la répression pénale, tel qu’on peut l’induire de l’écart entre les chiffres de la justice et ceux, estimés, de la fréquence de cette pratique. La politique anti-avortement a pu, sans atteindre le but qui lui était explicitement assigné, n’en être pas moins opérante à divers niveaux.

MOTS-CLÉS

  • France
  • XX
  • biopolitique
  • droit
  • normes
  • action publique
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