Le niveau de la mer à Venise d'après l'œuvre picturale de Véronèse, Canaletto et Bellotto

Par Dario Camuffo
Français

La hausse du niveau de la mer due au réchauffement climatique contemporain met Venise en danger. Il est nécessaire, afin d’envisager des remèdes, de mieux connaître l’histoire de la hausse du niveau de la mer depuis le petit âge glaciaire. De manière générale, la peinture fournit des images qualitatives, mais dans le cas de Venise, elle permet une évaluation quantitative de la hausse du niveau de la mer apparent (HNMA), grâce aux tableaux peints avec exactitude par Canaletto et Bellotto à l’aide de la camera obscura. Ces tableaux reproduisent avec une grande précision les moindres détails, y compris la ceinture d’algues. Nous discutons la méthodologie permettant d’estimer l’exactitude des tableaux et la façon de distinguer une copie d’un original. L’analyse de ces tableaux et la comparaison avec le niveau actuel des algues permet d’étendre dans le passé notre connaissance de la submersion vénitienne sur une période de près de trois siècles. Depuis l’époque de Canaletto, c’est-à-dire la première moitié du XVIIIe siècle, la HNMA=61±11 cm. Pendant cette période, le taux moyen de submersion de la ville a été de 1,9 mm par an. La moitié environ de la HNMA est due à l’affaissement du sol, le reste à la dilatation thermique des eaux océaniques. Un tableau de Véronèse, « La présentation de la Famille Coccina à la Vierge », nous offre une opportunité unique de connaître le niveau de la mer en 1571. Si l’on compare, dans le palais Coccina, le nombre de marches sans algues avec la situation actuelle, on obtient une HNMA=82±9 cm. Pendant la période qui sépare Véronèse et Canaletto, de 1571 à la première moitié du XVIIIe siècle, le taux de submersion moyen de la ville était de 1,2 mm par an, principalement à cause de l’affaissement du sol.

MOTS-CLÉS

  • Venise
  • XVIII
  • camera obscura
  • montée des eaux
  • réchauffement climatique
  • peintures
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