Cet article étudie les réactions de la population au rapport secret de Khrouchtchev, exprimées au cours des réunions organisées pour discuter des résultats du XXe Congrès. Les documents utilisés proviennent des archives du parti communiste de la région de Gorki.La perspective adoptée est celle de l’histoire sociale «par en bas»,qui tente de capter la parole populaire à propos d’un événement.Les sources mettent en évidence la domination des cadres locaux de l’État-parti dans leur interaction avec la population,surtout à la campagne. Ainsi, le parti communiste apparaît avant tout comme une caisse de résonance des points de vue des cadres. Dans la région de Gorki, la déstalinisation est restée le plus souvent sous le contrôle des autorités.L’importance des débats sur le «culte de la personnalité» ne doit pas être surestimée: quand ce thème était discuté, les préoccupations locales dominaient.La dénonciation du culte de Staline visait à critiquer tous ceux qui avaient du pouvoir. Nous retrouvons ici la vieille opposition entre «eux» (les chefs) et «nous» (le peuple): comme avant 1917, le peuple russe affirmait son droit à la dignité et protestait contre les outrages commis par les gens au pouvoir.