Publier La Peur : la fabrique d’un « succès » du livre de guerre en 1930

Par Nicolas Beaupré
Français

En octobre 1930, Gabriel Chevallier publie La Peur aux éditions Stock, qui ont publié, un an plus tôt, avec un énorme succès, la traduction française d’À l’ouest rien de nouveau d’Erich Maria Remarque. À l’aide d’archives encore inexploitées, cet article propose une étude de tout le processus éditorial, de l’écriture à la publication, du livre de Gabriel Chevallier. Il permet de montrer comment s’articulent le rôle de l’auteur et celui de l’éditeur et comment le premier investit le rôle du second. Il confirme aussi l’importance, pour le revival de la littérature de guerre au tournant des années trente, du succès international du livre de Remarque, mais aussi, en France, de celui du débat autour des livres de Jean Norton Cru, Témoins (1929) et Du témoignage (1930). Ces livres proposant une esthétique du témoignage, ils amènent Gabriel Chevallier à se situer par rapport à elle, voire à infléchir son propre projet. Par son approche micro-historique, cet article permet à la fois de mieux comprendre la fabrication d’un livre mais aussi le contexte culturel dans lequel, par le livre, se construit une mémoire littéraire de la Grande Guerre. Cette étude de cas permet enfin de mieux saisir comment et pourquoi la vague de littérature de guerre des années 1930 se fonde sur une fictionnalisation de l’expérience de guerre, à rebours des desiderata normatifs de Jean Norton Cru, sur une lecture largement, et parfois radicalement, pacifiste du conflit et sur une circulation désormais transnationale des œuvres et des modèles littéraires qu’elles portent.

Mots-clés

  • Première Guerre mondiale
  • littérature de guerre
  • témoignage
  • histoire de l’édition et du livre
  • Éditions Stock, Gabriel Chevallier
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